ATTENTION mon cher lecteur,
Karlsruhe défie Francfort !
Les juges en rouge s’en prennent aux banquiers en gris.
Ce geste peut avoir la beauté du désespoir ou la grossièreté de la bêtise crasse.
Sans doute a-t-il les deux. Nous verrons mais quoi qu’il en soit, se profile une opportunité pour VOUS.
Ainsi, la Haute Cour Constitutionnelle allemande de Karlsruhe donne 3 mois à la Banque centrale européenne de Francfort pour justifier ou arrêter son programme de rachats des dettes publiques de la Zone Euro… Entamé en 2015.
L’indécision des juges
Pour mémoire, la BCE a racheté environ 20 % des dettes publiques de la Zone Euro de 2015 à fin 2018 puis de nouveau à partir du mois de novembre dernier : nos problèmes étaient là bien avant le virus.
À fin avril, il y en a pour 2 300 milliards environ, dont 460 milliards pour l’Allemagne. Ce sont ces dettes dont la haute cour conteste la légitimité.
En revanche, la Haute Cour valide le plan d’urgence de 750 milliards de rachats des mêmes dettes pour faire passer la pilule du confinement, y compris 150 milliards de dettes allemandes.
Donc la Haute Cour vient d’accepter le rachat de 150 milliards de dettes
allemandes tout en demandant la revente de 460 milliards déjà acquises (éventuellement à long terme, ils sont sympas ces juges).
Allez savoir ce qui se passe dans la tête de ces juges qui acceptent un rachat en demandant une revente et qui, pour commencer, ne contestent pas le principe des rachats de dettes par la BCE mais seulement la proportion.
C’est un peu court.
Voilà pour la témérité, le « choc », le « tremblement de terre » dont la presse parle. Je crois que je préférais encore les débats sur le sexe des anges pendant le siège de Constantinople.
Nous avons donc des juges indécis et contradictoires mais, et c’est important, leur requête est fondée grâce à 46 ans de jurisprudence courageuse.
Une requête fondée en droit
Mettons que la BCE n’arrive pas à convaincre la Cour de la légalité de son action.
C’est tout à fait possible.
Du côté européen, le rachat des dettes publiques par la BCE N’est PAS interdit (donc autorisé ?) par l’art.123 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne, mais semble bien l’être en revanche par l’art.124… C’est habituel dans la pratique actuelle du droit qui produit un nombre gigantesque d’articles qui finissent par se contredire. Il y a saturation de la loi.
Mais qu’importe car l’art.125 donne toute latitude à la Commission Européenne et au Conseil pour interpréter les deux articles en question comme ils veulent. Aussi, du point de vue de l’Europe, il n’y a aucun problème sur la légalité de l’action de la BCE (le fait que la loi soit léonine est un autre problème).
En revanche, cela devient plus subtil quant à la prééminence du droit. En effet, la Cour de Karlsruhe a pour mission de faire respecter la loi fondamentale allemande (En France, son équivalent est le Conseil constitutionnel présidé par Laurent Fabius, c’est vous dire son manque total d’indépendance). Et si en France, les traités européens priment sans réserve sur le droit constitutionnel (on se garde bien de vous le dire d’ailleurs), l’Allemagne, elle, est bien plus prudente, démocrate même.
Dans l’arrêt célèbre de 1974 « So lange » ou « aussi longtemps que », la haute cour allemande estime que le droit européen NE primera PAS sur la loi fondamentale tant que celui-ci ne garantira pas le même niveau de droit aux citoyens que la loi fondamentale allemande.
Cet arrêt a ensuite été édulcoré jusqu’au traité de Lisbonne de 2007, celui-là même dont sont tirés les articles auxquels j’ai fait référence ci-dessus.
Les juges ont alors estimé que le traité était constitutionnel… À condition que l’Union Européenne se dote d’un réel pouvoir démocratique, équivalent aux parlements allemands (sic) !
Voilà donc cette Cour qui n’hésite pas à souffleter Bruxelles traitant ces technocrates d’autocrates.
C’est peut-être un tigre de papier, mais avec du panache.
Aussi, du point de vue Allemand, l’avis de la haute cour l’emporte sur le droit européen (ce qui ne serait pas le cas en France encore une fois).
D’un point de vue purement légal, la requête de la Cour est donc tout à fait légitime et fondée en droit.
Chiche !
Nous avons donc des juges contradictoires mais avec une requête fondée. Nous avons également des juges qui devraient faire attention à ce qu’ils demandent.
Mettons que la Cour allemande juge les rachats de la BCE anticonstitutionnels. Le couperet tombe :
- Non seulement, la Cour interdit à la Bundesbank de continuer ses rachats en folie de dette publique qui détruit les taux et les épargnes presque aussi sûrement que la guerre ;
- Mais elle lui intime même de revendre 310 milliards de dettes allemandes (le solde de 460-150 milliards).
C’est que dans le programme de rachat d’actifs de la BCE, ce sont les banques centrales nationales qui rachètent les dettes de leur pays et en aucun cas des autres. La Bundesbank rachète les dettes allemandes comme la Banque de France rachète les dettes françaises.
L’Euro est un mariage avec un contrat en séparation de biens… Chacun ses comptes et chacun sa responsabilité : juridiquement d’ailleurs, la Bundesbank n’est pas responsable des rachats de la BdF et inversement.
C’est un point très important, si un jour l’Euro devait éclater, les dettes ne sont pas mutualisées et nous nous rendrions compte qu’il y a en fait plusieurs euros : un euro allemand, un euro italien, un euro français…
Au passage, il existe un moyen simple d’acheter des euros allemands ou hollandais et de vous assurer que votre épargne est du bon côté de la barrière. Je vous en reparlerai bientôt.
Ces juges se rendent-ils comptent qu’ils dirigent leurs canons sur leurs propres lignes ?
Si l’Allemagne décide d’arrêter unilatéralement ses programmes dits « anti-crise » de « soutien à l’économie » : eh bien après tout, pourquoi pas ?
Cela provoquerait un petit tremblement de terre, mais avec quelques bonnes paroles et l’assurance que ce mouvement n’engage pas l’Allemagne vers la sortie de la Zone, cela pourrait passer.
Les marchés savent bien au fond que la pomme de discorde ne se situe pas là (j’y reviens dans une prochaine lettre).
Bien sûr, cela poserait des problèmes juridiques importants, il faudrait refaire les traités… Nous l’avons bien fait pour la Grèce. Car initialement, le soutien aux pays membres était interdit aux instances européennes.
Techniquement, cela pourrait même se traduire par un rééquilibrage de la Zone : l’attractivité allemande en prendrait un coup, les taux allemands remonteraient et les tensions entre le Nord et le Sud pourraient s’estomper.
D’un point de vue purement cynique, ce nivellement par le bas ferait le jeu de Bruxelles et Francfort… Mais également des épargnants qui retrouveraient en Allemagne des placements avec un bon rendement et peu de risques.
Comment vous positionner sur la décision de la haute cour
Il est probable que la décision de la haute cour ne débouche sur rien d’immédiat. Mais au cas où, il convient de se tenir prêt à réagir.
Nous ne savons ni le jour, ni l’heure mais nous nous devons d’être prêts et de veiller sans cesse.
Cette décision restera en tout cas un point d’étape important dans la construction de la jurisprudence allemande. Elle nous permet de nous rendre compte que le droit allemand est resté bien plus indépendant que le droit français et laisse la porte ouverte à une sécession allemande ordonnée.
Bien plus que l’Italie, l’Allemagne est le candidat le mieux placé pour mettre fin à l’expérience de la monnaie unique qui est objectivement un désastre.
Dans ce cas, il convient d’avoir des euros allemands.
Mais si la décision de la haute cour allemande était appliquée, il serait également intéressant de transférer une partie de votre patrimoine en euros allemands pour profiter d’une remontée des taux.
Au pire, si rien ne se passe, votre euro allemand n’aura pas perdu de valeur par rapport à nos euros français.
Nous avons donc une situation asymétrique ou nous pouvons bénéficier des mouvements allemands sans ajouter de risque à notre patrimoine.
Avec Aude Kersulec, nous revenons en détail sur l’intérêt et l’exécution pratique de cette stratégie dans la prochaine édition de Risque & Profit. Pour recevoir votre exemplaire, demandez votre offre d’essai ici.
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À votre bonne fortune,
Guy de La Fortelle
PS : Le vrai problème de l’Euro est le système Target 2 et c’est par là que viendra le signal de la crise de l’Euro. J’y reviens très bientôt.
Sources :
Sur le programme de rachat par la BCE : https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/omt/html/index.en.html
Le texte du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:12012E/TXT&from=FR
Analyse de la décision de la haute cour suite au Traité de Lisbonne : https://www.fondation-res-publica.org/L-arret-du-30-juin-2009-de-la-cour-constitutionnelle-et-l-Europe-une-revolution-juridique_a431.html
Décision de la Haute Cour concernant la BCE (en Allemand): https://www.bun
Je m’appelle Guy de La Fortelle et je rédige le service d’information GRATUIT et INDÉPENDANT : L’Investisseur sans Costume.
À partir d’aujourd’hui, je vais vous dire tous les secrets de l’économie et de la finance que les médias grands publics « oublient ».
J’ai écrit un article complet sur €URO : Les juges en rouge s’en prennent aux banquiers en gris, une opportunité en or
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Guy de La Fortelle