Mon cher lecteur,
Mon grand-père était meunier.
Ce n’était pas maître Cornille, il dirigeait une grande entreprise de meunerie.
Et Moscou faisait partie de ses clients.
C’était le Moscou de Brejnev, Andropov et Tchernenko, le grand soir de l’URSS.
Mon grand-père, donc, livrait sa farine à l’URSS discrètement et n’importe comment.
Discrètement car il ne fallait pas savoir que Moscou avait tant malmené les terres noires de son grenier ukrainien que celui-ci ne suffisait plus à les nourrir.
N’importe comment car selon les mots de mon grand-père, sa farine nourrissait les oiseaux plus que les populations.
Il devait fournir sa farine en vrac car elle devait passer pour ukrainienne et la farine ukrainienne devait être livrée en vrac car le Plan l’avait dit.
Malheureusement, personne n’avait avoué aux grands planificateurs de Moscou que leurs voies ferrées étaient mal assemblées et les planches de leurs wagons mal jointes : entre les cahots et les jours, près de la moitié de la farine se trouvait dispersée dans les plaines de Pologne et d’Ukraine.
C’est-là que cela devient amusant : à la première cargaison, les Russes se plaignirent qu’il n’y avait pas le compte. Après enquête, on découvrit le problème, mais plutôt que de le régler en livrant la farine en sac, on continua à disperser la farine aux oiseaux car pour livrer la farine en sac, il eut fallu avouer que les trains russes étaient défectueux.
Et cela était tout à fait impossible, en tout cas bien plus difficile que de perdre la moitié d’une cargaison de blé. Pour cela il avait suffi de graisser la patte du PCF.
C’est comme cela que l’on finit avec 100 millions de morts sur les bras.
Enfin tout ceci se passait en des temps très anciens…
J’aime bien les trottinettes électriques à Paris.
Vous savez celles en libre-service.
Ces machines se sont mises à encombrer les trottoirs, à bousculer les piétons imprudents et finissent d’achever le loisir paisible de la flânerie à Paris.
Je les aime bien ces trottinettes car elles révèlent l’état de décomposition achevé de nos modes d’administration.
Elles sont une caricature qui révèle de manière simple et évidente le monde complètement couillon dans lequel nous plongent ceux qui nous gouvernent.
Les trottinettes sont comme le blé russe de mon grand-père.
Elles sont un indice qui révèle, un coin de voile levé, un effet de bord inattendu.
Officiellement, les trottinettes sont une « mobilité douce » selon les mots de ceux qui ne se déplacent jamais sans leur chauffeur.
Les têtes fragiles de nos édiles parisiennes ont vu arriver d’un bon œil ces trottinettes partagées qui allaient mettre un peu plus de voitures au rancart et sauver les ours polaires à défaut des prochaines élections.
Je ne rigole pas, voici comment se présente humblement la société Lime qui a lancé la mode dévastatrice des trotti électriques :
Les dirigeants de Lime ont créé cette société en se posant une simple question : Comment pouvons-nous faire en sorte que les futures générations puissent vivre dans un monde sain, et s’épanouir en même temps ?
C’est un beau Plan. Sauf que c’est tout l’inverse qui se passe.
Les engins sont si bien traités qu’ils ne durent pas 3 mois avant d’être rendus totalement irrécupérables. Ces quelques jours de vie ne suffisent pas à rentabiliser ces services qui pourtant nous polluent pullulent.
Le Figaro vient de le découvrir et les entreprises derrière ces services, elles, le savent depuis bien longtemps. Mais au lieu de s’arrêter et d’aller faire autre chose, elles continuent de plus belle, la bataille fait rage et le nombre de trottinettes en circulation devrait être multiplié par 4 à Paris d’ici la fin de l’année.
Nous savons déjà comment cela va se finir, d’abord ça :
Puis ça :
Je suis sûr que grâce à ces jolies montagnes, nous nous trouverons tous plus « sains et épanouis », merci Lime.
Mais alors qu’est-ce qui ne tourne pas rond ?
Comment se fait-il que nous nous retrouvions dans un monde soviétique dans lequel nous assumons de faire n’importe quoi, dans lequel il devient normal, et même moral, de marcher sur la tête ?
J’ai bien ma petite idée et ce sera l’objet de ma lettre de demain, car il paraît que j’écris trop long, alors pour aujourd’hui je m’arrête.
Si cette lettre vous a intéressée, transférez-la à votre carnet d’adresse et partagez-la sur les réseaux sociaux.
Et si vous avez une idée de ce qui crée cette situation, écrivez-là en commentaire ci-dessous.
À votre bonne fortune,
Guy de La Fortelle
Je travaille à Bruxelles. Ici aussi, à la grande joie des citadins, il y a des trottinettes, des bicyclettes, que l’on peut louer. Bizarrement, les gens les traitent bien.
La semaine dernière j’étais à Paris. Effectivement j’ai pu constater des trottinettes abimées jetées par terre, des jeunes donnant des coups de pieds dedans.
Vous avez raison quelque chose ne marche pas. Mais reconnaitre qu’à Paris on ne peut pas faire ce qui se fait partout ailleurs…qui aura le courage de le dire? Donc ça continue…en espérant l’hypothétique retour d’un esprit civique – entre temps ça fait gagner de l’argent à certains.
cette citation d’Augustin d’Hippone (je pense que vous saurez de qui je parle !)ne date pas d’hier mais reste d’actualité , pas seulement pour les trottinettes mais pour pas mal d’innovations ,parfois inutiles , qui ont du rapporter gros aux concepteurs (ballons alcoo-test , alarmes anti-fumée , radars , rond-points ,panneaux routiers , portiques autoroutiers , round-up etc…etc…)
» A force de tout voir ,l’on finit par tout supporter
A force de tout supporter, l’on finit par tout tolérer
A force de tout tolérer, l’on finit par tout accepter
A force de tout accepter ,l’on finit par tout approuver »
Nous commençons à nous résigner en voyant que ce que nous refusons (traités divers ,abandon de notre autonomie au profit de technocrates européens incapables )nous est imposé dictatorialement d’où la désaffection populaire face au vote et l’aggravation de notre décadence inexorable et DESESPERANTE
Et beaucoup plus grave notre grand remplacement au nom d’une idéologie délétère et éminemment perverse pour notre avenir civilisationnel
Merci à vous de pointer du doigt des dérapages » non sans conséquences » d’une manière humoristique ,l’humour étant paraît-il la politesse des désespérés
Société de consommation, peu importe la suite du moment que les entreprises gagnent de l’argent tout de suite. Cela finira comme dans le Joueur de Flûte de Hamelin, sauf que les rats c’est nous…
Et si le problème était le capitalisme ?
Les trottinettes qui ne fonctionnent que 3 mois, font un service autre que transporter des personnes : elles font une communication positive de la société, qui elle peut augmenter son capital, et racheter d’autres sociétés. les gros achètent les petits, et asphyxient les entreprises qui comptent sur leurs ventes pour vivre…
Cela me fait penser à l’histoire des vendeurs de glaces que vous aviez raconté dans ce blog…
En tout cas, j’ai hâte de connaitre votre point de vue final.
Je ne suis pas d’accord concernant votre commentaire sur « le monde soviétique dans lequel nous assumons de faire n’importe quoi, dans lequel il devient normal, et même moral, de marcher sur la tête ». En Russie et l’Ukraine les gens sont plus respectueux, civilisés et bcp mieux éduqués qu’une grande partie des gens européens que je rencontre à Bruxelles et Paris, surtout les jeunes… Ce n’est pas comme ça que j’imaginais l’Europe.